Un autre exemple de psychologie métaphysique ou idéaliste
est celui de Blaise Rosnay qui me dit : « Portes-toi bien, c’est ça
l’important ». Tout d’abord, on ne peut noter qu’une vague adresse
amicale, en tous cas rien de sincère, puisqu’il ne s’agit là que d’une
abstraction idéaliste qui vise à se faire croire qu’en général on souhaite le
bien de l’autre. Mais dans le fond, comme tout acte de morale idéaliste, je
pense que seul le ressentiment voire une mauvaise intention se trame derrière
cette adresse. Je suis convaincu qu’il s’agissait d’abaisser, alors qu’une
réelle intention d’amicalité sincère aurait été toute différente. Je ne
m’attarderai pas ici sur les raisons qui me font penser cela, mais tout
m’indique qu’en dehors du truchement idéaliste, il y a au contraire un désir
d’assigner l’autre à son malheur, de le lui souhaiter, et de se réjouir de son
bonheur à soi. Dans le fond, la psychologie idéaliste n’est qu’une incantation.
mercredi 29 août 2018
Quête
Je me demandais si mon père calculait ses propos
destructeurs. Mais non, il saisit seulement l’occasion, sans se comprendre
lui-même. Opaque à lui même, il ne peut que chercher un sens à sa vie, dans une
quête spirituelle. Mais ceux-là ne cherchent pas la vérité à vrai dire, il
cherchent la réalité qu’ils ne possèdent pas, et cette réalité pourtant, ne
leur dirait pas non plus qui ils sont, mais leur ferait juste sentir le monde.
Voilà la quête. Or les gens de quêtes s’obscurcissent sans comprendre qu’il n’y
a rien à trouver, mais tout à sentir. Ils ne savent pas qu’ils recherchent la
réalité, mais travestissent cela sous le nom de vérité.
Censure
Un censeur est par définition quelqu’un qui se censure
lui-même. Son engouement à falsifier la réalité a pour origine la sienne propre.
Ayant du mal à se connaître, il pense poser les limites adéquates. Mais cela
n’est qu’un symptôme d’une peur essentielle.
Le caractère officieux qu’il prend sur les choses est
également symptomatique du mensonge : il faut mentir pour vivre, et
déclarer des choses qui ne concernent que soi. Or son auditoire, qui n’est pas
concerné, prend cela à la légère et avec indifférence. Il y a pourtant une
victime de ce caractère officieux : la personne censurée.
Mensonge
Le menteur se réfugie dans l’absolu, car il ne peut faire de
lien entre les choses, il ne sait faire de liens entre les choses. A défaut de
pénétrer une quelconque totalité, il se noie dans l’absolu qui est son
contraire. Voilà l’origine de la religiosité. Encore qu’elle sache largement se
confondre avec le réel, le fanatique quel qu’il soit utilisera du mensonge en
guise dé vérité et pleinement conscient de son mensonge, sa pensée se délitera
jusqu’au chaos. Il oublie alors, il oublie tout.
mardi 21 août 2018
Artificialité (Dubaï)
Est artificiel ce qui ne repose sur rien, ce qui ne
construit rien, ce qui ne développe rien, ce qui ne contient rien. Des villes
émergentes, aussi utopistes soient-elles, se confondent au désert d’où elles
naissent. Le désert est peuplé, habité. L’artificialité est d’autant plus
flagrante qu’elle nait dans un désert. Elle a en face d’elle ce envers quoi
elle lutte. Cependant elle crée un espace vide de sens, de consistance, elle
s’érige comme un dôme sans conviction, sans idée, sans Dieu. Elle ne respire
pas, bien qu’elle fournisse tant d’effort à s’oxygéner, à parader, à se
gonfler. Elle n’a pas véritablement de souffle, si ce n’est ses fondations
tangibles, qui pourtant ne révèlent rien de ce qu’elle est : un vide de
sens. On pourrait se sentir à l’aise parmi son aspiration futuriste ou
utopique, mais il manque quelque chose pour que cela soit possible. Il lui manque la
pensée, l’affrontement de la pensée, mais plus encore, le monde lui-même, et la
sensibilisation qui dépend de ce monde. Il n’y a aucune place pour la
réjouissance. Le monde est devenu ce qui l’a précédé : un espace où combat
la matière et l’antimatière, une lutte acharnée sous des apparences de calme et
de tranquillité.
lundi 20 août 2018
Progrès
Toute forme de progrès recherche, à terme, le plaisir,
l’idée lointaine du bonheur. Ce que s’acharne le progrès à obtenir, voilà qui
est parfaitement voilé, opaque. Car le progrès court vers quelque chose qu’il
ignore. Et pourtant il a su précisément ce que c’était que cette chose qu’il
veut atteindre. Cette chose lui a été donnée, originairement. Il l’a vécue, et
il veut la vivre à nouveau, intensément, à défaut de l’avoir perdue. Cette
chose qui le fait suer et qui le détend, quand ayant fini son travail il l’imagine
toute proche, il la désire. Ce qu’il désire pourtant, est nécessairement
brouillé, imprécis. Il l’a eu, il le connait, et il y pense tout le temps. Il y
pense tellement qu’il l’oublie, mais son but l’anime, le possède. Cette chose
originaire, il sait qu’elle lui a été donnée
Le grand malheur du progrès, c’est qu’il détruit lentement
la chose originaire, et qu’il s’empêche totalement de la retrouver, à raison de
l’avoir détruite. Il eût suffit qu’il cesse de s’activer, pour l’obtenir. Mais
la chose eût été trop imprécise pour qu’il s’en contente. Il est plus facile de
s’acharner à l’obtenir que de souffrir son absence. Le progrès est ce principe
de destruction de la chose qu’il recherche, qui l’anime, et de création de son
propre enfer chargé d’illusions. Ces illusions là ne le laissent pas
tranquille, parce qu’elles ne sont pas claires, mais torturées : elles
sont le principe d’inquiétude.
dimanche 19 août 2018
Foi
Le déisme ne cessera jamais de se manifester dans le temps,
toujours en réaction à des manques d’humanités, des trivialités, des débauches.
Mais cette manière qu’il a d’évoluer en réaction à ce vide laissé par la mort
de Dieu est fondatrice de beaucoup d’autres choses. Le ressentiment reste le
même et peu à peu, les déistes finissent par se rallier à la cause des non
croyants. Leur ennemi devient l’élément vital, du moins en apparence, qui
« pullule dans les rues ». Cet élément vital qui s’affiche est une provocation
non pas à Dieu, mais au ressentiment qu’il suscite et à plus forte raison, au
manque d’élément vital chez ceux qui ont en aversion cet élément. La vie
s’affiche, mais qu’est-ce que cela signifie ? Personne ne s’y penche,
déiste comme incroyants se retranchent dans des fondations qui sont de
véritables arrières-mondes, justifiés par divers prétextes. Ces prétextes se
contredisent largement parmi ceux qui crachent leur haleine à la face du monde.
Cette haleine se répand, et les uns comme les autres fulminent face à une chose
catégorisée qui ne signifie rien. Cette chose, avec du recul tout le monde
comprend qu’elle est une formation de l’esprit, un crachoir nécessaire au
ressentiment.
Parmi les déistes, il y a ceux qui persévèrent dans l’idéal de
pureté et ceux qui sont en colère. Ceux qui sont en colère souffrent moins.
Car rien n’est moins dur que de supporter ce qui n’est pas conforme à l’idéal
de pureté ou au souverain bien. Ceux qui sont en colère crachent et
fulminent avec l’accord de Dieu qui est un simple prétexte,
et ils se servent de ceux qui souffrent tant pour appuyer leur haine. La
foi est invisible, et la plupart des gens y pensent et se confient à
cette chose invisible. Seulement la confusion règne parmi les esprits, et Dieu
lui-même n’entre plus du tout en compte parmi ce jeu de haine qui s’élabore
dans les cités, les sociétés. Chacun a son idée d’un Dieu qui le protège, et
tout le monde est plus ou moins jaloux de son Dieu. La foi est quelque chose de
très personnelle, et quand il s’agit d’intimité, on ne la partage pas. L’un des
malentendus de la religion, c’est qu’elle nécessite un rapport intime à Dieu
plus encore qu’une communication. La communication est une affaire plus humaine
que divine.
samedi 18 août 2018
Ordre
Il faut savoir une seule chose. L’ordre sur lequel repose le
monde n’a pas de fondements. Cet ordre est senti par tous les gens, et pourtant
il ne repose sur rien, il peut voler en éclats, se disloquer. Cet ordre anime
les esprits, il les échauffe, il les console, il les motive. Mais cet ordre
pourrait tout aussi bien être une pure construction, une pure spéculation. Ses
assises semblent tellement stables, et pourtant il n’en est rien. Viscéralement
les gens respectent cet ordre et s’adonnent à lui. Les rites qui lui sont
offerts sont la manifestation de sa puissance, de sa longévité. Mais il n’est
rien en raison de ce qu’on ne peut percevoir, il n’est rien hors de lui-même.
Il est tout en lui-même et dans la perception qu’on a de lui, mais il ne vaut
rien, il n’explique rien, il n’est rien d’autre qu’un souffle qui peut virer à
tout moment. Ce souffle qui anime les gens, animerait le cosmos ? Chaque
découverte, fruit de cet ordre, nous en écarte, nous en éloigne. Il viendra un
temps où cet ordre n’aura plus aucune signification, car il est dans la nature
de cet ordre de nous faire comprendre et assimiler qu’il n’a rien d’un ordre
naturel, qu’il ne nous a pas été donné, mais que nous l’avons construit.
Aurions-nous été les victimes de ce que nous avons perçu ou
cru ? La réponse à la genèse de cet ordre est tout autant insoluble que
son avenir. Aucune évidence ne peut nous éclairer sur son évolution ou son
passé. Nous ne savons rien de ce dont nous sommes convaincus. Rien ne peut
éclairer cette lumière. Nous vivons avec une conviction qui ne sait rien d’elle,
nous jugeons de ses principes qui nous semblent les bons, les plus évidents.
Nous jugeons nécessaire d’éduquer en vertu de cet ordre, mais déjà l’édifice s’ébranle,
et déjà les sciences que nous avons décelées nous contredisent.
samedi 11 août 2018
Antiquité
Oui j’ai œuvré en fumant du cannabis. Par l’excès ou la
folie en général, j’ai ouvert mon esprit. La schizophrénie que j’ai atteinte
m’a permis de saisir beaucoup de chose. En ce qui concerne la pensée antique,
j’ai pu la pénétrer aussi. L’image de ce qu’ont pu être Socrate ou Diogène, je l’ai
formulée en moi, je l’ai conçue et vécue. Je me suis retrouvé dans leur parole,
et j’ai pu voir le fossé qui s’est creusé dans la conception que l’on a de la
sagesse de nos jours. Ces gens là étaient dissolus. Leur sagesse les guidait
par le biais d’une folie purificatrice, et l’éclat de leurs propos était le
symptôme de cette ouverture d’esprit que l’on a perdue. Leur voix était
étrange, leur mode de vie bizarre et leur coutume totalement perdue, reniée
depuis x progrès qui ont mis en pièce la pensée et la raison première, telle qu’elle
fut formulée dans l’antiquité.
mercredi 8 août 2018
Déisme
Ces pseudo-spirituels jubilent de leurs affres et leur désir
de castration. Ils croient en un Dieu créateur qui légitime leurs méfaits. Mais
seule leur pulsion de mort les anime, et la vieille rancune envers ce qui ne
dépend pas d’une structure invisible qui déciderait de nos actes.
Ceux qui ont de telles croyances ont la frousse de mourir et
accusent la finitude. Ils croient en leur Dieu pour espérer de vivre. Mais
d’autres croyants, peut-être les juifs plus que les chrétiens, manifestent
d’avantage de joie dans leur soumission à Dieu. Ils espèrent l’égaler.
Baby Boom
La génération du baby boom garde son secret pour elle. Elle
n’explique pas à ses propres enfants comment elle a pu accéder à un bonheur
valide. Ce bonheur a été le fruit d’une réflexion et d’une évolution qui est
aujourd’hui bloquée, enrayée, et cette génération sait pertinemment comment
l’obtenir, seulement elle le cache, car elle ne veut pas que ses enfants soient
seuls face au monde, seul face au golem. Ce Golem c’est le capital, et nos
parents ayant perdu la partie, ils cachent leur bonheur à leurs enfants. On
pourrait dire qu’on ne souhaite jamais le meilleur à ses enfants, c’est vrai,
mais on souhaite aussi qu’ils ne se fracassent pas sur la paroi de notre échec.
Et l’échec de nos parents, c’est qu’ils n’ont pas réussi à proposer autre chose
que le capital. Le capital, cette autre forme de secret qui désensibilise, est
la seule chose permise. Ce qui n’est pas permis, c’est le bonheur tel qu’il a
pu être conçu par nos parents jaloux, et peut-être soucieux de notre réussite.
vendredi 3 août 2018
C
Le clitoris est l’organe de l’exposition et de
l’abandon au monde brut, des impressions aussi bizarres, étranges et variées
que sa morphologie, sa géographie. Cet assujettissement se laisse dériver, dérouter par les accidents, les vents, les changements que le
monde impose. Et tout le plaisir est dans ce changement, cette capitulation.
Autant que le monde tourne et s’impose, l’organe est en effervescence.
Le monde est perçu, subi. Le sentiment qu’il
inculque est un indéniable plaisir premier, traversant les âges, mais d’autant
mieux mis en valeur que l’époque le permet. Le plaisir évolue, change, mais son
axe de rotation reste ce plaisir à la merci du monde qui dure autant que la
puissance de soumission à son emprise est forte. Avoir la force de s’offrir au
monde et de le recueillir est le moyen d’obtenir ses faveurs si subtiles, si
volatiles tout en étant dominées par le noyau de la terre.
Corps et espace contemporain
Certains des plus ignares de notre jeunesse participent à certaines fêtes contemporaines, non pas
pour assouvir leur désir, mais pour tenter d’avoir du désir. Ils n’ont pas, à
proprement parler de désir, mais veulent en avoir. Les corps qui s’exhibent
sans tabous sont une superbe image du désir qui s’annule, qui est impossible.
Leur désir n’est plus qu’un fantasme du désir, une vague et nébuleuse
perception de ce que pourrait être le désir et qu’ils ne peuvent obtenir. Rien
ne leur manque, sauf le désir.
Mais ces gens là sont l’objet du capital et du
puritanisme. Le puritanisme les entretient, et ils l’entretiennent également.
Le puritanisme est dans son essence la négation des corps, et ces gens là sont
également la négation des corps, mais en quelque sorte de manière inversée. Ils
sont l’impossibilité d’avoir un corps, de vivre un corps. Ils sont dissociés de
leur corps. Leur esprit ne fait pas corps, leur esprit est séparé de ce qu’ils
ne peuvent réaliser : leur propre corps. Ils ne peuvent le faire fusionner
avec ce qu’ils désirent lointainement, ce qu’ils pensent être le désir réalisé
et que le puritanisme leur a interdit. Ils perpétuent en quelque sorte
l’interdit jusqu’au bout, jusqu’à ce que l’interdit leur soit attribué dans la
pleine expression du corps, et que l’impossibilité de le faire interagir avec
quelque chose d’extérieur soit atteint. Voilà la complaisance du
puritanisme : avoir fait des guerriers de la négation du corps.
Le capital, ou par extension l’industrie du
service est un moyen de suppression du corps. Le corps immergé dans le service
n’est plus un corps, puisque le service le remplace. L’un des paradoxes du
monde réduit au service est le culte du corps. Car le corps se venge de n’avoir
plus d’utilité en se surajoutant au réel, en se surexposant. Pourtant ce n’est
plus tout à fait le corps, car il ne fait plus corps avec le monde. Il est
juste un luminaire indiquant sa fin prochaine, son abolition. Il n’est pas ou
plus connecté avec ce qui l’entoure, il est réduit à lui-même, et s’affiche
comme un totem. Il tente de résoudre sa propre énigme : sa disparition
générée par le capital.
Impulsivité
L’impulsivité est une forme de contenant,
quand le contenu est vide. Ce vide de contenu s’exprime par le déni et
l’agressivité. Les chimères qui peuplent l’esprit des impulsifs les vident de
tout contenu. Le contenant ou l’impulsivité est le signe de ce vide de contenu,
il est comme la bogue épineuse qui entoure un marron absent, détaché de sa
bogue, perdu.
Les impulsifs ne vieillissent pas, leur
contenant bloque leur contenu. Ils sont à la solde de leurs chimères et leur
impulsivité les préserve de toute évolution. Mais leurs chimères les vident
toujours un peu plus, et grossissent à mesure que leur contenu disparaît, au
profit de l’impulsivité.
Imagination
L’imagination provient d’un surplus de
questionnement sur le monde et d’une stimulation face à sa beauté ou son
énigme. C’est une manière de désengorger le flux de désespoir ou d’incompréhension
qui peut advenir entre l’homme et le monde. L’image est une construction face à
l’énigme. C’est une manière de rationaliser le monde qui ne se dévoile pas,
notamment quand les mots sont impuissants à le faire. C’est donc un acte de rationalisation.
Il est certain que l’image précède les mots et qu’elle est la première relation
de l’homme avec le monde. Elle n’est pas plus trompeuse que les mots, d’autant
plus qu’elle les précède.
Inscription à :
Articles (Atom)